Reprenant la stratégie marketing déjà éprouvée par George Lucas, le professeur Piotet publie le Cours de droit civil du Canton de Vaud donné par le professeur François Guisan en 1875 sous la forme d’une volumineuse trilogie. À vrai dire, il a su faire languir les fans, eux qui attendaient la sortie des tomes II et III depuis 2015, année de parution du tome I. Les presque 1600 pages au total de ces deux volumes les raviveront1 . Faut-il le rappeler ? Cette publication se fonde sur une série de cahiers manuscrits déposés à la Bibliothèque cantonale et universitaire, qui proviennent apparemment de Guisan lui-même. Celui-ci, né en 1805, avocat, procureur général puis professeur de droit à l’Académie, s’occupa de l’enseignement du droit civil de 1863 à sa mort en 1878. Les cahiers qui ont servi à l’édition datent vraisemblablement de 1875, dernière année durant laquelle le droit civil vaudois s’appliqua intégralement. Dès 1876, une première loi fédérale sur l’état civil, les registres qui s’y rapportent et le mariage, commença à restreindre le champ d’application du droit cantonal avant que celui-ci ne se réduise progressivement à quelques domaines résiduels.

Le Code civil du canton de Vaud fut adopté en 1819. Inspiré en grande partie du Code civil français (Code Napoléon) de 1804, il reprend aussi diverses règles provenant des coutumes locales ou des ordonnances bernoises de l’Ancien Régime.

Le Cours de Guisan consiste essentiellement en un commentaire du Code, article par article. La lecture en est assez aisée, puisqu’il s’agit d’un outil d’enseignement. La structure de la présentation, article par article, permet de trouver facilement les informations que l’on pourrait chercher sur telle ou telle norme juridique. Le lecteur peut même considérer qu’il obtient une vision exhaustive, ou presque, de l’état du droit civil vaudois à cette époque, dès lors que les juristes n’étaient pas encore confrontés à l’inflation des publications de tous ordres qui pullulent aujourd’hui. L’éditeur complète par ailleurs le Cours par des références à divers arrêts publiés dans les quelques revues de l’époque, ainsi qu’aux auteurs français, lorsque le Code vaudois s’inspire des règles du Code Napoléon.

Le tome II contient les dispositions relatives aux successions, aux principes généraux du droit des obligations (contrats et responsabilité civile), ainsi qu’aux régimes matrimoniaux.

Le tome III correspond aux articles qui traitent des différentes formes de contrat, des privilèges (règles de priorité entre créanciers en cas de défaut du débiteur), des hypothèques, de la possession et de la prescription. La bibliographie relative aux trois tomes s’y trouve rassemblée.

Cette double parution achève ainsi la publication d’une source fort utile aux chercheurs. Il faut souligner que les personnes intéressées par l’histoire du droit vaudois ont la chance de pouvoir disposer de nombreux ouvrages modernes facilement accessibles, couvrant un grand nombre de domaines, sur une large période, dont beaucoup sont publiés à la Bibliothèque historique vaudoise. Ainsi en va-t-il, par exemple, du droit des successions, des règles sur les privilèges et hypothèques, des régimes matrimoniaux, du registre foncier pour ce qui est du droit privé, mais le droit constitutionnel, le droit pénal, le droit de la procédure civile ou le droit des poursuites ne sont pas oubliés. Le droit des obligations (contrats et responsabilité civile) reste inexploré, malgré son importance (cela s’explique peut-être par son origine plus directement tirée du droit français). Le Cours de Guisan complète donc bien ces études spécifiques par une présentation générale de l’ancien droit civil cantonal, qui comprend aussi le droit des contrats et celui de la responsabilité civile. Avis aux amateurs, donc.

Notes
1 Voir le compte rendu in RHV, 125, 2016, pp. 288-290.

Zitierweise:
Ballenegger, Cédric: Rezension zu: Guisan, François: Cours de droit civil du Canton de Vaud : 1875, texte annoté et référencé par Denis Piotet, Lausanne : 2021. Zuerst erschienen in: Revue historique vaudoise, tome 130, 2022, p. 233-234.